OEUVRES ÉLECTRONIQUES no.8


Annie Abrahams
being human
1998
being human s’intéresse à la communication sur Internet, en particulier à la nature de la correspondance par courrier électronique. Reposant sur le texte comme moyen d’expression et exploitant les diverses façons de le traiter visuellement, l’artiste s’interroge sur le désir d’entrer en contact avec l’autre, sur la différence individuelle, sur la possibilité d’établir un échange véritable sur Internet. Elle a recours a diverses interventions visuelles afin d’exprimer la nature de ces échanges: les choix de couleur du texte et de l’écran, la dimension des caractères, les superpositions et les fragmentations de mots, l’apparition et la disparition de ceux-ci visent à révéler différents états concernant la qualité et l’intensité des échanges. L’oeuvre met ainsi en relief la volonté de communiquer, ses possibilités et ses limites. Elle jette un regard perspicace sur ce qui concerne chacun d’entre nous, ce qui fait de nous des êtres humains dans ce désir fondamental de se relier aux autres.
(nécessite Netscape 4.0)
S.P.

Natalie Bookchin
The Intruder
1999
The Intruder, de Natalie Bookchin, est basé sur un récit de Jorge Luis Borgés raconté dans une série de 10 jeux. C’est l’histoire de deux frères, Christan (l’aîné) et Eduardo (le cadet), qui sont amoureux de la même femme, Juliana. Ils décident de la partager et vivent une relation quasi impossible. Christan finit par tuer Juliana pour que les deux frères puissent de nouveau vivre en paix. La série de 10 jeux interactifs qui servent de matériel visuel et de matériel écrit est décrite à travers divers jeux, pour la plupart violents, qui animent la lecture à haute voix d’une femme avec un chaleureux accent espagnol. Le spectateur est invité à : attraper les mots qui tombent, détruire des vaisseaux spatiaux, échanger une femme dans une partie de pong, jouer au football, regarder des objets tomber d’un vagin et participer à un bon vieux duel de cow-boys. Ce que l’Intruder réussit à faire, c’est de combiner l’esprit compétitif des jeux vidéo, toujours plus populaires chez les garçons, et la compétitivité désastreuse des hommes adultes pour l’amour d’une femme.
(nécessite Shockwave)
V.L.

 

Heath Bunting, Olia Lialina
Identity Swap Database
1999
Ce projet offre la possibilité de participer à la constitution d’une base de données regroupant des identités ou de rechercher une identité à l’intérieur du répertoire formé. Le formulaire, rédigé en de nombreuses langues, donne une allure internationale au projet et permet de supposer une vaste quantité des participants. Or, la nature saugrenue de certaines informations demandées a vite fait d’apporter un ton ironique au projet. De plus, les résultats farfelus obtenus lors de la recherche d’une nouvelle identité offrent peu de correspondance avec celle désirée. L’oeuvre amène à réfléchir aux limites des systèmes informatiques qui catégorisent les individus et se font les juges des désirs humains. Elle met en évidence l’illusion qui consiste à croire dans le caractère exhaustif d’Internet. De même, par sa manière de traiter de la création de soi et de la quête d’identité sur Internet, Identity Swap Database s’intéresse à un phénomène très répandu en jetant un éclairage critique sur lui.
(Irational.org et Teleportacia)
S.P

 

Critical Art Ensemble
Flesh Machine
1997
À travers leurs nombreux projets, le collectif Critical Art Ensemble a développé un regard critique sur les nouvelles technologies et leur impact sur la conscience individuelle et sociale. Que ce soit dans leurs performances, leurs oeuvres sur CD-ROM ou sur le Web, et leurs textes critiques, ils ont élaboré des projets marquants autour de ces questions. Flesh Machine porte plus spécifiquement sur les rapports entre les technologies de reproduction et leurs conséquences sur les plans politique et social. L’image d’un homme au corps irréprochable, tiré tout droit d’une publicité de mode, agit comme accès à l’oeuvre et signale le désir de perfection corporelle qui occupe l’imaginaire commun. Une série d’images et d’affirmations révèlent ce qui se cache derrière cet idéal: le marché des organes humains, le contrôle sur le bagage génétique des individus, l’invasion de la vie privée. Le regard que pose CAE sur ces phénomènes met en évidence l’idéologie capitaliste qui récupère tout sur son passage, y compris le corps des individus et leur désir de perfection.
S.P.

 

Alicia Felberbaum
Holes-Linings-Threads

1998
Le site Holes-Lining-Threads d’Alicia Felberbaum est basé sur les explorations visuelles et théoriques qui ont pour point de départ les écrits de la théoricienne cyberféministe Sadie Plant. Il retrace les connexions entre le travail des femmes dans l’industrie textile et la naissance de l’ordinateur. Alda Lovelace, pionnière de la programmation informatique des années 1840 (considérée par plusieurs comme la première conceptrice de logiciels) joue un rôle majeur dans l’élaboration théorique et visuelle de ce site. Holes-Lining-Threads se sert d’une grille d’images sélectionnées de Batley, dans le West Yorkshire, en Angleterre, appariées à du matériel d’archives (tels des documents) de la révolution industrielle. Des citations du livre de Sadie Plant, Zeros and One: Digital Women and the New Technoculture, s'entremêlent aux images de la ville et de ses bâtiments industriels désaffectés, reproduisant une métahistoire de la participation des femmes à l’industrie textile.
(Produit par Pavilion et Iris en collaboration avec Channel/ Artec, dans le cadre du Photo 98 Public Sightings Programme)
(nécessite Shockwave)
V.L.

 

Tina LaPorta
Future Body
1999
Le site Future Body privilégie la relation entre le corps subjectif de la femme et l’interface technologique. Un corps de femme parfaitement formé en fil métallique flotte dans l’espace. On peut y accéder par divers points d’entrée (oreille, poitrine, derrière, main, cuisse). On navigue par chacun de ces points pour arriver à l’image changeante et déconstruite du corps dans des mouvements et des milieux arrêtés de façon inquiétante. La sexualité est ici représentée sous la forme d’un sujet disloqué, désincarné, où le corps de la femme est le contenant d’informations et de codes transférables. Future Body remet en question la présence et le rôle de l’identité et de l’individualité féminines à l’intérieur de la technologie construite des communications. (nécessite Shockwave)
V.L.

 

Debra Solomon
The living
1997-1999
Le site The Living, de Debra Solomon, cherche à créer une séance numérique continue d’un an. L’artiste utilise des réflecteurs live CU-SeeMe et des lignes de bavardage pour télécharger ses activités quotidiennes au cours desquelles elle entreprendra un pèlerinage aux lieux de naissance de la mythologie numérique. Là, elle interagira avec le monde réel et le monde virtuel, où le public sera invité à lui suggérer d’autres possibilités pour son pèlerinage. Elle créera ainsi un échange interactif entre le monde « réel » et le cyberespace. Les séances sont souvent centrées sur des situations physiques où l’artiste se trouve dans des endroits comme : le fond d’une piscine, pédalant sur un bateau, roulant en vélo, sans jamais quitter son petit portatif. Le but est de créer le récit d’une séance continuelle en ligne, une chronique de travail digiculturel se déroulant à la fois dans le monde physique et le monde numérique. L’artiste tente de vivre dans une réalité où l’image construite de l’avenir est projetée dans le présent dans un rêve de connectivité totale.
(Nécessite Shockwave)
V.L.

 

Æ (Gisèle Trudel, Stéphane Claude et Florian Wüst)
Sylva
1999
Sylva examine les rapports conflictuels et harmonieux qui peuvent existent entre la technologie et la nature. Une image en QTVR sert de porte d’entrée à un ensemble de représentations proposant différents chemins cachés qui manifestent les formes que revêtent le désir de s’unir à la nature et l’ambition de la conquérir. Durant le parcours proposé, le visiteur se verra confronté à une vision idéalisée de la nature, à sa récupération à des fins commerciales, à la crainte ressentie devant les forces naturelles incontrôlables, aux efforts déployés pour la maîtriser, mais aussi aux innovations techniques qui s’inspirent de l’intelligence du monde naturel. La justesse de l’oeuvre repose sur la correspondance qu’elle établit entre la forêt (sylva en latin) - lieu naturel emblématique qui de tout temps a exprimé l’inconnu, le caché et le mystère - et le cyberespace affublé ainsi des mêmes caractéristiques.
(nécessite Quicktime 3.0 et Real Player)
S.P.

 

Victoria Vesna
Bodies Incorporated
1996-
Bodies INC est basé sur un modèle d’entreprise où l’ontologie de l’entreprise est à la fois critiquée et reproduite. Une communauté globale participe à la construction d’un corps sur mesure en trois dimensions avec des parties vendues par Bodies INC par un processus d’achat d’actions. Plus le(la) participant(e) accumule d’actions, plus il(elle) peut acheter de pièces et plus le corps devient complexe et particulier. Le site est partagé en trois grandes sections : LIMBO INCorporated, donnant des renseignements sur des corps inertes laissés en suspens, abandonnés ou négligés; NECROPOLIS INCorporated, où les propriétaires peuvent choisir la façon dont leur corps mourra, et SHOWPLACE111 INCorporated, où les membres participent à un forum et s’exhibent. Ce projet Web met de l’avant la politique d’identité et l’impossibilité de séparer les identités physiques et corporelles. Ainsi, le façonnement du corps = le façonnement de l’identité. Le ton institutionnel du site – avec sa bureaucratie de parties du corps et la paperasserie de la mort et de la création – critique la culture capitaliste tout en étant mal à l’aise d’en utiliser la forme.
(Requiert Netscape 4.0+, RealAudio 3.0, , un VRML 2.0) (Produit par: Viewpoint Data Labs, Netscape, Alias/Wavefront, Silicon Graphics, Meta Tools, The David Bermant Foundation, SIGGRAPH, le Contemporary Art Center de Nouvelle-Orléans, le Musée d’art de Santa Barbara, l’Institut d’art de San Francisco, Cactus R&D, RAIN, UC Santa Barbara.)
V.L.

 

virgil
Genochoice
1999
Genochoice revêt toutes les apparences d’un véritable site Web d’une firme spécialisée dans le domaine de la biotechnologie. L’image idéalisée de bébés au côté de celle d’un médecin généticien accueille le visiteur dans une atmosphère de confiance et sous le ton de la vérité. Même un même bandeau publicitaire vient appuyer cette esthétique. Peu à peu, le site dérive pour laisser cours à tous les fantasmes possibles dans ce domaine - création d’un clone de soi, d’une progéniture conçue avec un partenaire quel qu’il soit... Sous le charme de ces nouvelles possibilités, le visiteur se laisse prendre à un jeu devenant de plus en plus absurde, où il pourra déterminer non seulement le sexe et les qualités physiques de son enfant, mais aussi « améliorer » (upgrade) ses chances de montrer un comportement idéal dans le futur et d’être protégé de maladies auxquelles il serait soi-disant prédisposé d’après la lecture du code génétique des donneurs. Une facture rondelette accompagne tous les changements désirés, et des messages par courrier électronique informent les heureux parents du bon développement de leur « création ». L’oeuvre effectue un passage progressif et critique montrant que derrière le désir de procréer un individu sain se cachent souvent les exigences toujours plus élevées et farfelues des géniteurs. Elle révèle le caractère monstrueux que peut prendre ce désir et met en évidence les visées commerciales de ceux qui profitent de celui-ci.
S.P.

 

Commentaires rédigés par Valérie Lamontagne et Sylvie Parent

 

 



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